samedi 16 janvier 2010

Ce qui tue l'homme ? Son manque d'imagination...

Permettez ce petit capriccio...

...Lépante (7 octobre 1571, 12h00...golfe de Patras)


Lettre de Guglielmo Ciardi à sa mère...


"Lépante- 8 octobre.... O mère, soulagez mon désespoir.... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie! Où sont donc toutes ces stances à la gloire de notre Dieu ? Déchiquetées avec les viscères de l'ennemi ?

Alvise est mort ce matin...

Où sont donc tous ces Salve Regina pour notre Vierge ? Pulvérisés avec la cervelle de l'ennemi ?

...un mousquet ibère, la victoire pourtant promise, lui a arraché la mâchoire...

Où sont donc tous ces Confiteor pour notre Sauveur ? Carbonisés avec le corps de l'ennemi ?

...Le regard interdit, il a gargouillé dans mes bras toute la nuit...


Où sont donc toutes ces litanies pour nos bienheureux ? Gorgées d'eau avec le cadavre de l'ennemi ?
O mère, l'homme a révélé ici tout le venin qui le bâfrait !

Ultime mêlée, suprême corps à corps, debout sur les flots, l'onde rubiconde effleurant à peine nos genoux, tant la mer vomissait indifféremment cadavres affolés, nefs brésillées, agonisants désarticulés, voilures lacérées...
O mère, soulagez mon désespoir... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie !"

Ce qui tue l'homme, c'est son manque d'imagination.

Waterloo, 18 juin 1815...sous la mitraille anglaise, Guglielmo et les siens ondulèrent comme blé au vent... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie !

Verdun, 19 février 1914...sous un déluge de terres brûlées, Guglielmo, sifflet aux lèvres, fut enseveli vivant à l'assaut de la côte 304... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie !

Buchenwald, 13 juillet 1943...la mélodie pleurée de quatre violons lyncha Guglielmo... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie !

Bagdad, 25 octobre 2004...une sordide vidéo égorgea Guglielmo, bras entravés en croix... Jamais plus, j'imagine, l'homme ne dégurgitera pareille furie !


Ce qui tue l'homme, c'est son manque d'imagination.



Agostino Barbarigo

Ali Pasha









2 commentaires:

  1. Heureusement, l'inverse existe aussi et nombreux sont "les hommes de bonne volonté".
    Anne

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  2. Hélas, il faut bien constater ce paradoxe : "c'est dans l'horreur que son imagination est la plus débridée !"
    Ricordati Marcantonio Bragadin... c'était juste avant Lépante !

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