mercredi 2 décembre 2009

L'affaire Grattarol...





Nous sommes en 1772. C’est à lui, Pietro Antonio Grattarol, qu’échoit l’honneur solennel d’ouvrir la première Loge maçonnique à Venise: l’Union 438.
Il occupe alors le poste prestigieux de secrétaire des inquisiteurs.
On voit même en lui le prochain Grand Chancelier. Une ascension fulgurante !

Et pourtant, treize années plus tard, fin 1785, bouffé par la malaria, il meurt seul, en exil sur les côtes de Madagascar, condamné à mort par la République de Venise.
Entre les ors de Venise et les fièvres palustres des Iles, que s’est-il réellement passé ?

Il y a ce que d’un chacun nomme l’affaire Grattarol.


Le jeune et ambitieux secrétaire vénitien tombe follement amoureux d’une actrice de théâtre en vogue à l’époque : Teodora Ricci. Les soupirs d’alcôves et les étreintes charnelles rapidement accordés par la Ricci blessent le vieillissant comte Carlo Gozzi, amoureux transi de la belle actrice. Pour se venger, ce dernier se sert de son arme de prédilection : la plume. Il introduit dans sa dernière pièce un personnage grotesque et ridicule, don Adone.
Venise ne s’y trompe pas et reconnaît aisément en Adone le secrétaire Grattarol. Ce qui devait être une aimable vengeance se transforme rapidement en une affaire d’Etat. Excuses émises, Gozzi veut faire marche arrière ; lettres insultantes, Grattarol exige l’annulation de la pièce.

Tous les coups sont permis. Bizarrement, les inquisiteurs imposent cependant la reprise des représentations. Le succès de la pièce est tel, que la troupe s’en va en tournée. Défait, Grattarol commet alors l’irréparable: il quitte Venise sans l’autorisation de la Seigneurie, acte gravissime vu ses hautes fonctions.


Un long et désastreux exil commence: Brunswick, Stockholm, Londres, et enfin la baie d’Antongil.

Banale histoire de fesses à l’origine de cette déconfiture humaine? Certes. Mais la Seigneurie exploitera malicieusement cette lubrique affaire pour se débarrasser d’un personnage devenu par trop dérangeant. Secrétaire des inquisiteurs et Vénérable de la Loge maçonnique Union 438, deux fonctions incompatibles aux yeux de la Sérénissime, vu les innombrables secrets d’Etat que devait brasser le Grattarol...

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